Projet achevé : Génétique et résistance aux polymyxines

Des scientifiques ont identifié un nouveau gène qui induit une résistance acquise aux polymyxines et élucidé les mécanismes qui influencent son expression chez les bactéries.

Utilisés en médecine humaine, les polymyxines sont des antibiotiques de dernier ressort auxquels il est aussi fréquemment recouru en milieu vétérinaire. Un nombre croissant d’agents pathogènes développent une résistance aux polymyxines, dont de nombreuses souches d’Escherichia coli et de Klebsiella pneumoniae. Cette tendance peut être observée en médecine humaine comme vétérinaire. Afin de mieux comprendre les processus susceptibles de favoriser l’émergence et la propagation de ces résistances, des chercheuses et chercheurs de l’Université de Fribourg ont étudié les mécanismes de régulation précis qui en sont à l’origine dans différentes souches bactériennes. Ces travaux pourront également servir à réaliser des analyses comparées des bactéries antibiorésistantes issues d’échantillons d’origine humaine, animale ou environnementale en vue de déterminer s’il existe certains échanges significatifs entre ces milieux qui pourraient être interrompus afin d’endiguer leur dissémination.

Identification de nouvelles causes génétiques de résistance

Les chercheuses et chercheurs sont parvenus à identifier un nouveau gène qui réduit la sensibilité des bactéries aux polymyxines, gène dont la présence a dans l’intervalle été confirmée dans le monde entier. Les scientifiques ont décrypté le mécanisme qui influence son expression en démontrant que celle-ci – et par suite la résistance à la colistine – est activée par l’administration de quantités suboptimales, c’est-à-dire non létales, de cet antibiotique de la famille des polymyxines. Cette découverte signifie que l’emploi d’un antimicrobien spécifique exerce une influence directe sur le développement des résistances observées à un moment donné. Le groupe de recherche a corolairement mis en évidence que le fait de l’abandonner pouvait permettre de désamorcer la situation: lorsque plusieurs élevages renoncent complètement à utiliser la colistine, les importantes colonies d’Escherichia coli antibiorésistantes précédemment présentes déclinent jusqu’à ne plus représenter qu’une très faible proportion.

Pas de transmission directe des résistances entre agents pathogènes animaux et humains

Afin de déterminer si des résistances spécifiques se transmettent entre les agents pathogènes animaux et humains, les scientifiques ont étudié et comparé de nombreux échantillons d’entérobactéries résistantes aux polymyxines en recherchant le gène nouvellement découvert. Grâce à des tests de diagnostics spécialement développés, ils ont analysé des échantillons prélevés dans l’environnement, des aliments ainsi que sur des animaux et sur des humains en Suisse, en France, au Portugal, en Egypte et dans d’autres pays. Les résultats obtenus ne font apparaître aucun lien évident et direct entre la résistance à la colistine observée en médecine vétérinaire et l’émergence d’entérobactéries résistantes à la colistine chez l’homme. Néanmoins, étant donné que de telles corrélations sont suspectées chez diverses espèces de microbes, les chercheurs recommandent que cette résistance spécifique soit recherchée chez d’autres bactéries au moyen des tests de diagnostic développés.

Mars 2023